Avec son nouvel album, Jourdan Thibodeaux implore les Louisianais de garder leur patrimoine culturel.
Cet article a été publié en partenariat avec Country Roads Magazine. Il est disponible en version papier et en ligne icitte.
Par Jonathan Olivier
En octobre passé, Jourdan Thibodeaux et son band Les Rôdailleurs ont joué le dernier concert du soir aux Festivals Acadiens et Créoles à Lafayette. Thibodeaux a chanté des chansons de son premier album en 2018, qui lui a donné un public en Louisiane et tout partout, ainsi qu’un mélange de nouvelles mélodies ancrées par ses paroles en français louisianais.
La dernière chanson du soir, aussitte le titre de son deuxième album qui est sorti ce printemps, La Prière, ne correspondait pas à la norme. Elle était doucement, rythmée, solennelle. La foule, qui avait passé les deux jours précédents à danser le deux-pas, le Jitterbug et la valse, s’est tournée vers la scène en révérence. Parmi ceux qui pouvaient comprendre les paroles en français de Thibodeaux, il y en avait qui ont braillé.
Dans les premières lignes, doublées d’une interview avec le défunt grand-père de Thibodeaux, Charles Herbert, il chante : « Tu vis ta culture ou tu tues ta culture, il n’y a pas de milieu. »
Dans la chanson, Thibodeaux reconnaît les jeunes Louisianais qui ne comprennent pas ses paroles, les gens qui ont oublié les traditions de la Louisiane et de sa langue, et tout quelqu’un qui ne parle que, comme il l’a chanté, « la langue de les conquis » : anglais.
Au cœur de La Prière, Thibodeaux invoque que la langue française, et la culture qui l’a soutenue, ne disparaîtront pas. Il prie pour que les Louisianais continuent à participer au riche patrimoine culturel de la Louisiane. Et il prie pour que sa génération ne soit pas la dernière à faire partie de cette culture.
Alors que La Prière est un sombre rappel de la manière dont l’américanisation a changé la culture louisianaise, c’est aussitte un cri de ralliement pour rassembler toutes les affaires culturelles que les générations précédentes nous ont laissées, afin de préserver et de continuer les qualités qui rendent la Louisiane si unique. C’est aussitte en grande partie le but de Thibodeaux.
« Y a du monde qu’est tout le temps après dire, « Je suis Cadien, moi je suis Créole ». Ils sont fiers de ça, Thibodeaux a déclaré. Mais tu peux pas avoir seulement le titre. Si tu veux le titre, t’as besoin de garder tout que tu as. T’as besoin de garder la langue, garder la culture, garder la religion, parce que c’est tout ensemble. »
Thibodeaux a appris le français de sa grand-mère, Lucille « Hazel » Blanchard. Afin de transmettre la langue à ses deux filles, il leur parle français à la maison, s’assurant que, dans sa famille, le lien culturel de plus de trois cents ans en Amérique du Nord demeure intact. Il s’en tient aux traditions avec lesquelles il a grandi : comme le catholicisme, la chasse et le jardinage, et des coutumes locales comme le jeu pâquage des œufs, qui consiste à frapper des œufs, ou pâquer, pendant le Jour de Pâques.
« C'est pas juste nous-autres, il a déclaré. On a pris quelque chose de quelqu'un d'autre et on a besoin de passer toutes les choses qu'on a pris à la prochaine génération. »
La date de sortie de La Prière a été retardée en raison de la Covid-19 en 2020. Thibodeaux, qui joue du violon et chante, a lancé l’album avec Valcour Records d’Eunice avec son band Jourdan Thibodeaux et Les Rôdailleurs, qu’il a fondé en 2018. Ces jours-là, le groupe est composé des musiciens Cedric Watson, Joel Savoy, Alan Lafleur et Adam Cormier.
Alors qu’un tas d’artistes locaux qui chantent en français aujourd’hui enregistrent des remakes de chansons plus anciennes, ou s’en tiennent aux notions traditionnelles de la musique cadienne ou zydeco, Thibodeaux écrit sa propre musique, selon ses propres termes. Ses chansons comprennent un tas de violon et mettent en évidence ses paroles en français. Pour La Prière, Thibodeaux et son band ont fait des chansons d’une liste d’environ 40 qu’il a écrit au cours des dernières années. « J'ai fait juste les chansons que je sens le plus asteur, Thibodeaux a déclaré. Parce que toutes mes chansons, c'est les vraies histoires de ma vie. »
L’album représente des extraits de la vie de Thibodeaux à l’île Cyprès, dans la paroisse de Saint-Martin. Quand quelqu’un lui demande quel genre de musique il joue, Thibodeaux répond habituellement : « Louisiana French music. »
« Quand j'étais petit, c'est ça que ma grand-mère a dit, il a déclaré. C'était French music et c'était la musique de la campagne. C'était jamais le cadien ou créole et tout ça. Parce que tout le monde ici était le même monde. On était une culture. »
Beaucoup de Louisianais ont été américanisés il y a seulement quelques décennies. Les affaires qui restent de la culture régionale du sud de la Louisiane sont après diminuer, mais elles survivent quand-même. Thibodeaux croit que le maintien de ces vieilles traditions qui comprennent la langue, le manger, la musique et les pratiques culturelles sert comme guide pour aborder l’avenir.
Et c’est peut-être le message durable de La Prière : respectez les traditions patrimoniales et continuez-les autant que possible.
« Comment tu vas connaître éyoù tu vas, Thibodeaux a déclaré, si tu connais pas d'éyoù tu viens ? »